La partie est par contre loin d'être terminée même si les opposants ont le gros bout du bâton, et une bataille de procuration pourrait se jouer si Lowe's revient à la charge avec une offre bonifiée après le rejet par Québec inc. de sa première proposition.
Deux autres importants actionnaires ont fait connaître leur position mercredi dans ce qui est pour les uns, un enjeu stratégique national, et pour les autres, une occasion de réaliser un gain de capital rapide sur un investissement décevant.
Les gestionnaires de fonds commun Invesco Trimark et I.A. Michael Investment Counsel, tous deux de Toronto, sont du deuxième groupe.
La firme Invesco Trimark, qui détient pour ses clients 11,88% des actions ordinaires de Rona par l'entremise de ses différents fonds, a confirmé hier qu'elle appuyait la décision du géant américain, soulignant même sa déception à l'endroit de la direction de Rona et de sa conduite des affaires. Invesco Trimark est investi dans Rona depuis cinq ans.
Le titre a perdu près de la moitié de sa valeur pendant cette période.
Le quatrième plus important actionnaire avec 3% du capital, la société I.A. Michael Investments, est aussi prête à tendre ses actions contre les 14,50$ pièce sur la table, sinon plus.
«Nous ne sommes certainement pas contre» la possibilité de voir la Caisse de dépôt et placement du Québec mener une contre-offre avec d'autres partenaires, a commenté le président de la firme qui gère notamment les fonds ABC, Irwin Michael lui-même, à l'agence Bloomberg.
Lowe's avait fait savoir hier qu'elle avait l'appui d'investisseurs institutionnels représentant ensemble 15% des parts. Les participations d'Invesco et d'I.A. Michael totalisent 14,88%.
De l'autre côté, on retrouve la Caisse et le Fonds de solidarité FTQ avec respectivement 14,18% du capital-actions et 3,5% du capital-actions de Rona.
On peut aussi compter dans la balance les 972 500 actions (0,8%) que possède le président et chef de la direction de Rona, Robert Dutton, selon l'agence Bloomberg. Au total: 18,5%. C'est plus qu'il n'en faut pour empêcher la fermeture du capital de l'entreprise.
Cheval blanc ou cavalier noir?
Selon Michael Lasser, de la firme UBS, une offre à 16-17$ serait toutefois difficile à ignorer pour toutes les parties. Certains, comme Vishal Shreedhar, de la Financière Banque Nationale, voient même Lowe's rempiler jusqu'à 19$ pour emporter la mise.
Keith Howlett, de Valeurs mobilières Desjardins, estime de même que l'opposition du ministre des Finances du Québec à la transaction est probablement gérable.
Surtout que, rappelle-t-il, une vingtaine d'acquisitions de plus de 500 millions de dollars ont été réalisées par des entreprises québécoises à l'étranger depuis l'an 2000. Il estime que ces juridictions peuvent s'attendre à un accès réciproque aux marchés du Québec et du Canada.
Selon l'analyste de Desjardins, les deux détaillants ont besoin que la transaction se réalise s'ils aspirent à améliorer leurs marges brutes, diminuer leurs coûts de marketing et améliorer leur réseau de distribution, dans le marché canadien saturé.
Le bénéfice de Rona a baissé de 54% de 2006 à 2011 et les activités canadiennes de Lowe's seraient déficitaires depuis cinq ans.
L'entrée en scène d'un cheval blanc serait plus étonnante, selon lui, le marché canadien étant trop petit pour soutenir trois acteurs de grande surface. Seules Home Depot et Canadian Tire pourraient espérer tirer profit d'une fusion avec Rona.
Mais la première est concentrée sur la simplification de ses activités autour de son concept à succès de magasin-entrepôt et Canadian Tire a d'autres chats à fouetter avec la venue de Target sur son marché l'an prochain, note l'analyste.
Les actions de Rona cotaient à 13,60$, en hausse de 10 cents, à la fermeture des marchés, mercredi. Celles de Lowe's ont reculé encore de près de 1%, à 25,14$US, mercredi, après avoir largué 6% la veille.