La presse (5 mars 2022) Francis Vailles Voici une chronique de Francis Vailles publie ce matin, je ne suis pas d'accord avec le pont de vue exprime dans le texte, la covid est a mon avis un ''act of god'', alors une situation qui depasse les balises de contrat.
Qu'en pensez-vous?
Furure Realty
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Le grand public ne le sait pas, mais le REM coute une beurre non seulement a la Caisse de depot et placement, mais aussi a la firme de genie SNC-Lavalin.
Et cette situation n’est pas sans consequence sur le prochain projet, le REM de l’Est. Pour comprendre, suivez-moi.
Le REM 1.0, rappelons-le, devait couter 5,5 milliards de dollars au printemps 2016, lors du lancement, puis 6,3 milliards au printemps 2018, a la premiere pelletee de terre. Aujourd’hui, tout indique que le projet excedera les 7 milliards en raison des consequences de la pandemie et des problemes du tunnel du mont Royal, si l’on exclut les a-cotes1.
C’est la Caisse de depot qui doit assumer la diffrence entre 6,3 et 7 milliards, en vertu de l’entente qu’elle a signe avec les deux autres financiers (gouvernements du Quebec et du Canada).
Or jeudi, le fournisseur SNC-Lavalin a laisse comprendre que le REM lui coutait la peau des fesses, lui aussi. Plus largement, l’entreprise a explique a quel point elle perdait beaucoup d’argent avec les projets cles en main a prix forfaitaires (CMPF), comme celui du REM. Il s’agit de contrats a prix fixes et a dates fixes, qui font porter sur la firme de genie et les entrepreneurs les risques de depassements de couts lies a l’execution.
Depuis deux ans, de tels contrats lui ont fait perdre 821 millions, soit l’equivalent de 42 % de ses revenus de ce secteur. Et ce n’est pas fini, car dans son expose aux actionnaires, elle indique qu’elle pourrait perdre encore jusqu’ 300 millions avec ce genre de contrats. Ouch !
La firme de genie-conseil ne ventile pas la part de ces pertes qui est attribuable au REM. On sait cependant que le projet de train lger de 67 km est son plus important parmi les trois principaux contrats CMPF encore au stade de l’execution. SNC-Lavalin chapeaute le consortium NouvLR, qui voit la conception et a la construction du REM.
Selon la presentation de SNC, ce contrat du REM est realis 60 %, et il lui reste l’equivalent de 600 millions de dollars a executer d’ici 2024, annee ou SNC-Lavalin prevoit avoir termine. Ces 600 millions representent la moitie de la valeur residuelle des contrats CMPF de l’entreprise, le reste etant essentiellement reparti entre les projets d’extension de la ligne de transport ferroviaire Trillium, a Ottawa, et celle d’Eglinton, dans la region de Toronto.
Bref, SNC-Lavalin perd beaucoup d’argent avec ces contrats, dont la moitie est pour le REM. Et face a cette situation, le PDG, Ian Edwards, a indique en juillet 2019 qu’il n’etait plus question d’offrir de tels contrats cles en main aux clients.
Qu’est-ce qui fait perdre autant d’argent SNC ? Divers facteurs. Il y a bien sur les difficultes de prevoir les risques d’execution de ces megaprojets. Il est possible, aussi, que SNC-Lavalin et ses partenaires aient ete trop « agressifs » dans leur soumission, offrant un prix fixe trop bas pour gagner l’appel d’offres.
Et plus rcemment, l’entreprise evoque une perte de productivit de 15 % 25 % attribuable l’absenteisme et aux mesures sanitaires lies a la COVID-19. La conjoncture economique a aussi fait bondir l’inflation dans le secteur de la construction (l’indice des prix de la construction d’immeubles a bondi de 11,2 % au 4e trimestre de 2021, contre 1,2 % un an plus tot).
Pour l’instant, ce genre de situation ne devrait pas trop inquieter la Caisse de depot, puisqu’en vertu de l’entente, c’est surtout NouvLR qui devrait etre tenu d’absorber la facture. En fait, certaines zones grises risquent d’exiger le recours aux tribunaux, comme le cas du tunnel, mais sinon, c’est NouvLR, et donc SNC, qui semble devoir casquer.
La situation ne sera pas la meme avec le REM de l’Est, que SNC-Lavalin soit le concepteur retenu ou non.
L’appetit est de moins en moins grand dans le marche pour les modes cles en main, ou l’on transfere un maximum de risques aux entrepreneurs. Le nouveau mode contractuel en vogue est plus collaboratif.
Sylvain Rouillard, president de la firme de conseiller en projets d’infrastructures InfraCapital
SNC-Lavalin vient justement de signer une entente de type collaborative avec le gouvernement britannique, le 10 fevrier, pour une voie ferree de 65 km, entre Oxford et Cambridge.
« Ce modele est un excellent exemple de la faon dont notre expertise peut aider a realiser les projets de nos clients, avec un niveau de risque equilibre et limite, tout en travaillant de manire unie », a alors declare Ian Edwards, de SNC.
Au Quebec, la regle du plus bas soumissionnaire empeche ce mode de contrat collaboratif avec le secteur public, une embuche qui risque de causer des maux de tete pour la realisation des megaprojets publics, puisqu’elle limitera le nombre de soumissionnaires. La Caisse de depot n’y est toutefois pas assujettie.
Bref, pour le projet de REM de l’Est, tout indique que la Caisse devra davantage travailler en mode collaboratif et participer au risque d’execution. Ca tombe mal, parce que ce risque – et les depassements de couts qu’il peut entrainer – est bien plus grand avec le REM de l’Est, le projet de 10 milliards etant davantage construit en zone urbaine, avec certains tunnels.
1. Il s’agit des quelque 900 millions depenes par les gouvernements pour les bretelles d’autoroute, les terminus d’autobus, la decontamination, etc.