Un texte de Jean-Michel Leprince
Les Cris de la Baie-James sont reconnus comme des champions de la ngociation. L’entente hydrolectrique de la Baie-James et la paix des braves ont permis aux Cris d’obtenir une certaine autonomie sur la gestion de leurs affaires permettant leurs communauts de jouir d’une certaine prosprit, souligne le grand chef de la Nation crie de Mistissini, Richard Shecapio.
Nous les Cris, on n'est pas contre le dveloppement. Nous l’avons montr dans le pass avec de bons exemples d’opportunits conomiques; long terme, c’est important d'avoir un quilibre entre le mode de vie cri de chasseur trappeur et le dveloppement des ressources.
Richard Shecapio, grand chef de Mistissini Photo : Radio-Canada Ces talents de ngociateurs, la communaut de Mistissini les a mis profit dans l’entente Renard.
Environnement et emploi
L’entente Mecheshoo avec la minire Stornoway a t signe le 27 mars 2012. Elle vise un partenariat dans l’exploitation de la mine de diamants. La mine produit depuis plus d’un an et demi. Quand elle sera rentable, les Cris recevront des redevances.
Entre-temps, on leur garantit des occasions d’affaires, des emplois moyen et long terme, et des outils de dveloppement professionnels, sociaux et culturels. Et, surtout, la protection de leur environnement et de leurs territoires de chasses traditionnels.
La mine Renard est situe sur le territoire de chasse de la famille Swallow, prs des monts Otish, 350 kilomtres de Chibougamau et 250 kilomtres au nord de la communaut crie de Mistissini.
Sans l’accord des Cris de Mistissini, il n’y avait pas de mine. Ils ont dj rejet un projet de mine d’uranium.
Pour le projet de mine de diamants, la communaut s’est mise d’accord pour ngocier le projet de Stornoway.
« L'avantage avec les Cris, c'est qu'ils sont bien organiss, explique le vice-prsident des affaires publiques pour Stornoway, Ghislain Poirier. Entre autres, ils ont une fdration, le Grand Conseil des Cris, qui a labor une politique minrale. Donc, leur gouvernement a tabli des normes pour l’acceptation et la ralisation de projets miniers. Et il y a de la place pour la consultation et la ngociation, le cas chant. »
D'une dure de vie value 14 ans, la mine Renard devrait produire annuellement 1,6 million de carats, soit environ 2 % de l'offre mondiale. Photo : Maxime Bertrand Priorit numro un : l’environnement. Protection des eaux et des territoires de chasse. Personne n’a le droit de sortir du site de la mine autrement que par la route ou par l’aroport local.
Numro deux : les emplois. Pour la construction et l’opration de la mine. Sur le milliard de dollars consacr la construction, 200 millions ont t verss des entreprises cries.
Recruter et convaincre
Pour les activits mmes de la mine, le recrutement d’employs cris est plus difficile. Ce sont pourtant des emplois bien pays : 80 000 $ par an en moyenne. Seulement 16 % des employs sont cris. Il en faudrait beaucoup plus.
Stornoway a ouvert un bureau Mistissini pour le recrutement de personnel qualifi et pour les relations avec la communaut. La mine avait besoin rapidement de 29 conducteurs de camions. Les recruteurs doivent aussi persuader les candidats qu’il est payant et intressant de travailler sous terre, o se droulera la suite des activits minires.
Emma Bearskin est opratrice de machineries lourdes la mine Renard. Photo : Radio-Canada La mine Renard a permis des Cris comme Emma Bearskin de raliser un rve. Jeune, elle jouait avec des camions miniatures. Maintenant, elle conduit de vrais gros camions. Emma Bearskin est d'ailleurs la fille de Steven Bearskin, ngociateur de la Convention de la Baie-James.
Les membres de la communaut de Mistissini occupent aussi des postes de haute responsabilit, comme Rodney Petawabano, contrematre de la mine ouverte. C’est lui qui planifie les activits de sautage et de forage tous les matins. Les plans doivent tre constamment rviss.
Rodney Petawabano, contrematre la mine Renard Photo : Radio-Canada De son ct, Jennie Saganash, responsable de la planification et de l'entretien du matriel la mine Renard, croit qu'il est possible un jour que le grand patron de Stornoway soit un Cri. « Je crois trs possible d'aller plus loin, dit-elle. Moi, je m'y vois, au rythme que je vais, en ce moment, je me vois monter assez vite ».
Jenny Saganash est responsable de la planification et de l'entretien du matriel la mine Renard. Photo : Radio-Canada Autre exemple de l'implication de la communaut crie dans les activits de la mine : les employs de la mine Stornoway sont logs un peu comme dans un l’htel, et c'est une entreprise crie, Kinkishguish (qui veut dire lagopde, comme la montagne qui surplombe la mine), qui s’occupe de la conciergerie, de l’entretien des chambres et de la gestion de la caftria.
L’ambiance est bonne parmi les employs venus de partout au Qubec et mme de l’tranger. On entend les trois langues, franais, anglais et cri. Une fois les premires gnes passes, de l’avis de tous, l’intgration est bonne.
En bordure de la mine, les Cris de Stornoway ont leur centre culturel : un tipi et une longue maison o ils font rgulirement des rencontres et des festins. Les non-Autochtones sont toujours les bienvenus.
Stornoway, on travaille 14 jours d’affile suivis de 14 jours de cong. Cela permet aux Cris, en ajoutant une semaine de vacances leur cong, d’aller la chasse : aux outardes au printemps, l’orignal l’automne.